« Sans le test d’activité, je n’aurais jamais osé changer de vie.  »

Audrey est entrée en CAPE en 2019, après avoir quitté son CDI et son ancienne vie d’écologue botaniste. Apprentissage du métier d’éleveuse-bergère, premiers pas en compta/gestion, développement de ses débouchés commerciaux, mais aussi parcours du combattant pour non pas une mais bien deux installations successives…  Retours sur un parcours pleins de rebondissements. Qui a dit que la vie était un long fleuve tranquille ?

 

Écologue-botaniste de formation, Audrey obtient un poste de CDI dans une association de la protection de la nature, six mois seulement après sa sortie de master… le graal dans ces métiers souvent bouchés, où il y a plus de demandes que d’offres d’emploi. A priori, rien ne destinait Audrey à la vie d’éleveuse-bergère donc. Pourtant, la rencontre en 2015 d’Alexandre, en test d’activité à la coopérative en tant qu’éleveur-berger, lui fait envisager la vie autrement. Audrey commence à se poser des questions personnelles et professionnelles, questions qui continuent de la tirailler les années passant.

« Je me disais que si je voulais essayer un tournant dans ma vie, il ne fallait pas attendre et là, ça me démangeait. »

Ne pas être seule pour oser se lancer

Ce qui lui fait sauter le pas ? Ne pas être seule dans l’aventure : tenter l’expérience via une structure dédiée lui donne le courage et la réassurance nécessaire pour prendre ce risque. C’est décidé, Audrey dépasse ses craintes et négocie une rupture conventionnelle pour quitter son CDI.

« Je me suis sentie accompagnée, soutenue. Je me disais aussi qu’au pire, je me rendrais compte que ce n’est pas pour moi, et il sera toujours temps de revenir en arrière. »

En test d’activité, vous bénéficiez de deux types d’accompagnement :

Un accompagnement « projet » par l’équipe interne des Champs des Possibles : dès votre candidature, vous êtes en relation avec un.e chargé.e d’accompagnement qui pourra vous suivre jusqu’à votre sortie de test. Ce sera votre interlocuteur.rice privilégié.e, qui s’appuiera sur toute l’équipe interne des Champs des Possibles pour vous accompagner : en pré-accompagnement (aide sur la définition de votre projet, de sa temporalité, de vos attentes, étude de la faisabilité économique, organisation du travail, tutorat…), lors de votre test (points réguliers pour vous permettre de prendre du recul, interface avec la comptabilité pour l’analyse de vos résultats économiques, médiation relationnelle en cas de difficulté…), à la sortie de votre test (aide à la gestion des aspects organisationnels et comptables de votre sortie, relais vers d’autres structures pour le « projet d’après »…).

Un accompagnement « métier » par un.e tuteur.ice qui vous fera bénéficier de son retour d’expérience adapté à votre projet et vous aidera à progresser sur tous les aspects de votre métier (technique, commercial, économique…). Cet accompagnement est systématique en agriculture, et encouragé pour l’artisanat alimentaire et le tertiaire.

Pour Audrey, l’accompagnement est multiple :

  • technique afin d’apprendre ce nouveau métier d’éleveuse-bergère-fromagère. Elle bénéficie du soutien d’une tutrice à appeler en cas de besoin -la tutrice n’étant pas sur place ;
  • administratif, afin d’apprivoiser l’exercice comptable et de gestion d’une entreprise.
  • psychologique aussi, afin de n’être pas seule face à ses doutes et questionnements.

« Les débuts de mon test d’activité ont été très chouettes, je les ai vécus comme une réelle aventure dans laquelle j’étais guidée, réorientée quand j’étais un peu perdue. »

Entraide et solidarité entre « collègues »

Autre élément important pour Audrey : la force du réseau de la coopérative, pouvoir échanger entre éleveurs et éleveuses qui sont confrontés aux mêmes problématiques que soi, et pouvoir convoquer des chantiers participatifs en cas de coup dur…

« Même si c’est rare, faute de temps, c’est super de partager ses questionnements pour trouver des solutions à plusieurs. Rien que le fait de savoir que l’on peut s’appeler en cas de galère fait beaucoup de bien. Cette empathie permet d’aller au boulot avec plus de courage le lendemain. »

Quelle que soit le type d’activité qu’ils et elles exercent, les entrepreneur.ses de la coopérative ont un point commun : participer à la transition agro-écologique et solidaire au sein d’une coopérative engagée. Entreprendre en coopérative permet aussi de bénéficier de l’expérience des autres, de trouver des solutions plus rapidement ensemble ou bien de solliciter des aides en cas de besoin.

Retrouvez ici les parcours et histoires de celles et ceux qui ont entrepris avec les Champs des Possibles.

La proximité avec le réseau des AMAP

Audrey prend aussi conscience du collectif au sens large dans lequel évolue Les Champs des Possibles, et notamment la proximité avec le réseau des AMAP. Ces relations facilitées l’incitent à creuser ce débouché commercial : aujourd’hui, les AMAP représentent 70% de son chiffre d’affaires.

« En tant que productrice, c’est génial de se nourrir de cette ambiance presque familiale. »

Depuis 2009, la coopérative Les Champs des Possibles travaille en étroite collaboration avec l’association Terre de Liens Ile de France et le Réseau des AMAP Ile de France. Ces organisations proposent un accompagnement complet aux porteurs et porteuses de projet. De ce partenariat est née l’association Abiosol en 2018. Sa mission : accompagner les porteurs et porteuses de projet agricoles et les territoires dans le développement de l’agriculture biologique, paysanne et solidaire, en Île-de-France.

L’acquisition du foncier : un parcours de combattante(s)

Audrey effectue son test d’activité en s’installant une première fois à Courances, même si elle savait déjà que ce serait de façon temporaire car le site ne pouvait pas l’accueillir après son test. Par bouche à oreille, Audrey identifie avec Alexandre le terrain sur lequel s’implanter -de nouveau : il se situe à Chevannes en Essonne. Pour s’y installer il leur faut monter un dossier auprès de la SAFER, Société d’Aménagement Foncier et d’Établissement Rural, qui décide de l’attribution du foncier agricole au niveau régional. L’accompagnement de la coopérative entre alors dans une phase plus étroite pour finaliser leur candidature et donner toutes ses chances à leur dossier. Le soutien de la foncière Terre de Liens Ile-de-France, qui travaille en étroite collaboration avec Les Champs des Possibles, est finalement décisif : Audrey et Alexandre s’installent à Chevannes.

« Les démarches étaient très lourdes, et ce n’était pas notre métier. Nous n’étions ni préparés ni compétents pour le mener à bien. L’appui technique, administratif et psychologique de la coopérative a été primordial, d’autant que pour moi, il s’agissait d’une 2e installation ! »

Plusieurs organismes recensent les offres de foncier disponible en Ile-de-France :

  • Objectif Terres, la plateforme qui recense les annonces de foncier agricole disponible de Terre de Liens, mouvement citoyen qui acquiert du foncier agricole grâce à l’épargne citoyenne et la loue ensuite à des porteur·ses de projet contre le versement d’un fermage et le respect de critères environnementaux. Terre de Liens Ile-de-France travaille en étroite collaboration avec Les Champs des Possibles, et sont regroupés avec le Réseau des Amap Ile-de-France au sein du pôle Abiosol.
  • Le Répertoire Installation : ce dispositif des Chambres d’Agriculture centralise les annonces des exploitations agricoles cherchant un·e repreneur.se ou un.e nouvel.le associé.e suite à un départ. En vous inscrivant en tant que porteur.se de projet en recherche de foncier, vous bénéficiez d’un accompagnement par cet organisme dans votre recherche d’exploitation agricole.
  • La SAFER Ile-de-France : Dans le secteur agricole et rural, le rôle de régulation du marché foncier relève des SAFER (Société d’aménagement foncier et d’établissement rural). Leur mission : améliorer la structure foncière des exploitations agricoles et faciliter l’accès au foncier des candidat.es à l’installation. Les SAFER ont un droit de préemption, c’est-à-dire qu’elles peuvent empêcher une vente si elles considèrent que l’acheteur·se n’a pas un projet adéquat ou que le prix est trop élevé. Pour connaître les propriétés disponibles à la vente via le réseau SAFER, rendez-vous sur Propriétés Rurales.
  • Ile-de-France Nature : propriétaire de 2 300 hectares de terres agricoles, cet organisme favorise l’installation d’agriculteurs dont les activités sont économiquement viables et compatibles avec les enjeux du territoire. Ile-de-France Nature peut louer ses terres agricoles notamment via des baux ruraux, ou bien assurer le portage du foncier et vendre les terres agricoles acquises et les bâtiments nécessaires à l’exploitation (hors habitation), en partenariat avec la SAFER Île-de-France. En savoir plus.
  • Mais aussi : journaux, réseaux d’agriculteurs et agricultrices, communes et collectivités… ces réseaux locaux peuvent relayer les annonces de foncier disponible, n’hésitez pas à les consulter régulièrement.


Pour plus d’infos, consultez le centre de ressources de Terre de Liens sur le sujet.

Et après le test ?

Audrey décide de rester à la coopérative et d’évoluer en tant qu’Entrepreneuse Salariée Associée (ESA). Sa motivation principale ? Rester dans un collectif, pour monter un jour un projet avec d’autres entrepreneur.ses bergers et bergères de la coopérative… Devenir ESA lui permet aussi d’acquérir le statut de salarié, qui comprend de nombreux avantages (cotisations chômage, retraite, congés payés, …).

Par ailleurs, Audrey savait depuis le début de son test qu’elle souhaitait rester à long terme dans la coopérative – choix qui l’a orientée dans sa stratégie d’entreprise : investissements longs termes, achat de troupeaux et de matériel de transformation très onéreux, à amortir sur plusieurs années… Aujourd’hui, son activité doit s’inscrire dans la durée pour fonctionner.

 

Crédits photo titre : Michaël Biard.

Le conseil d’Audrey pour oser ?

Suivre ses rêves tout en gardant les pieds sur terre… chercher à être bien entouré.e pour résister aux épreuves et gagner en force et en stabilité.