Pierre Péronnet a choisi de consacrer son stage de fin d’études d’ingénieur agronome à l’étude des collectifs agricoles en Ile-de-France. Après un temps de recherche documentaire, il a mené douze entretiens de groupes, réunissant 40 personnes installées ou en projet d’installation collective. Ces recherches ont abouti à la formalisation de quatre documents de restitution très complets– à retrouver en bas d’article. Il nous raconte sa démarche, ses observations, et propose quelques pistes pour encourager toujours plus d’installations agricoles en collectif.
Comment s’est déroulée cette étude sur les fermes collectives ?
La première étape a consisté à lire beaucoup de documentations sur le sujet. Il a fallu comprendre le paysage des collectifs agricoles, leur histoire, en France et ailleurs. Et se mettre d’accord sur la définition de ce qu’on appelle aujourd’hui une ferme collective -ce qui n’est pas si évident.
Ensuite, le cœur de mon travail a été de mener des entretiens avec des collectifs. Huit d’entre eux étaient des collectifs installés, quatre étant en cours de construction. J’avais deux objectifs au travers de ces entretiens :
- Identifier leurs besoins en termes d’accompagnement, de formations… pour réaliser leur installation et qu’elle perdure dans le temps ;
- Mais aussi -et j’étais moins sûr d’y arriver – profiter de ce temps d’échange pour nourrir leur collectif, parler librement de sujets qui le définissent et leur fournir des outils qui leur servent.
As-tu réussi à relever ce deuxième objectif ?
J’espère ! En tout cas j’ai été très touché par un retour que j’ai eu d’un jeune collectif dont l’une des deux personnes m’a dit vers la fin de l’entretien que c’était la première fois qu’elle mettait le mot de « collectif » sur leur organisation, et que cela rendait la chose concrète. Que le fait de consacrer du temps à ce collectif lui donnait envie de continuer de creuser le sujet, de voir comment fonctionner ensemble.
D’où t’es venu cet intérêt pour les organisations collectives ?
A titre personnel, j’ai toujours été accoutumé aux formes de vie en collectif. Et c’est en découvrant la Ferme de la Tournerie que j’ai commencé à m’intéresser au sujet des fermes collectives. J’ai été très impressionné par le fonctionnement de cette ferme, montée par d’anciens ingénieurs agronomes, qui ont réussi à se dégager un smic mensuel et cinq semaines de congés payés assez rapidement après leur installation… ça fait rêver !
Ce sujet s’est ensuite imposé à moi et a orienté ma recherche de stage de fin d’études aux Champs des Possibles.
Quels sont les principaux enseignements que tu en as tirés ?
Je dirais que ce qui ressort dans le fond, c’est un besoin d’être plus accompagné et formé sur la question du collectif, et particulièrement sur les aspects de gestion de l’humain (communication, posture, comment faire réunion, comment dire ce qui va et ne va pas…). Et sur la forme, les personnes que j’ai pu rencontrer sont demandeuses de rencontrer leurs pairs, d’échanger sur le fonctionnement de chaque collectif pour profiter des expériences et bonnes pratiques des uns et des autres.
Les Rencontres Cultivons le Collectif
Les Champs des Possibles et Cœur d’Essonne Agglomération organisent les 14 et 15 février 2025 à la Ferme de l’Envol les Rencontres Cultivons le Collectif, à destination des porteur·ses de projet collectifs et de tous les collectifs installés.
Au programme :
- Des temps de réflexion en commun avec (sous réserve de confirmation) Solidarité Paysans, Maëla Naël, agricultrice en ferme collective et autrice de Fermes collectives, le guide (très) pratique, Delphine Laurant, chercheuse sur l’accompagnement des collectifs et Fermes Partagées !
- Des ateliers par petits groupes avec des restitutions en plénière sur des sujets au cœur des problématiques des collectifs : gestion du leadership, de l’organisation du travail, de la communication, de l’argent…
- Des rencontres de professionnel·les de l’accompagnement des collectifs et de fermes collectives hors région !
- Sans oublier des temps partagés en toute convivialité…
Consultez le programme détaillé de ces deux journées.
Infos et inscription sur notre événement facebook ou article dédié.
Quels principaux conseils donner aux collectifs qui se structurent ?
Je conseillerais surtout de veiller à formaliser tout ce qui définit le collectif, ses règles de fonctionnement etc. J’ai en effet été surpris de ne voir que très peu de documents formalisant le collectif dans les rencontres que j’ai faites. Pourtant, ces documents formels sont des aides précieuses pour désamorcer d’éventuelles incompréhensions. Anticiper des sujets stratégiques (sur les sujets de rémunération, de prise de décisions, de temps de réunion, de réaction à telle situation etc.), formaliser la décision qui aura été prise collectivement et pouvoir s’y référer par la suite paraît indispensable au bon fonctionnement d’un collectif dans la durée.
Et parce que beaucoup de choses -et de personnes !- changent entre l’étape de projet et l’après-installation, il est très important de consacrer du temps à l’actualisation de ces règles de fonctionnement, notamment lors des premières années d’installation.
📸 Pierre Péronnet, auteur de l’étude sur le paysage actuel des fermes collectives en Ile-de-France lors de son stage aux Champs des Possibles
Et pour aller plus loin…
- Le guide (très) pratique des fermes collectives de Maëla Naël (et ce qu’elle nous en disait ici 🙂
- Le site agri-coll : issu d’un travail de recherche action de plusieurs années, aujourd’hui terminé. Documents, podcasts sur comment développer un collectif