Pain au levain, fermentations longues, moulins Astriés… tous ces termes vous parlent ? Vous vous intéressez de près à la boulangerie artisanale, en vue d’une reconversion ? Mais connaissez-vous bien de quoi est faite la vie quotidienne d’un ou une boulangère ? Rythme, formation mais aussi qualités requises ou matériel à prévoir… Hugo, accompagnateur aux Champs des Possibles des entrepreneur·ses en transformation alimentaire dresse pour nous le portrait de ce métier passionnant et porteur dans cette nouvelle Fiche métiers.
« Boulange artisanale », de quoi parle-ton ?
Pour commencer, précisons que les boulangères et boulangers accompagné·es aux Champs des Possibles pratiquent une boulange artisanale et paysanne, différente de celle que l’on pratique dans les boulangeries « traditionnelles ».
Elle se caractérise par :
- la provenance paysanne et bio des céréales, parfois issues de variétés anciennes,
- le recours à des moulins traditionnels pour la transformation des grains en farine (modèle Astriés),
- l’utilisation de farines* complètes et riches en nutriments,
- l’usage de levains naturels dans un processus de fermentation longue – raison pour laquelle, vous ne trouverez par exemple pas de « baguette » en « boulange artisanale », mais plutôt des pains de campagne, plus ou moins sombres en fonction de la densité de la farine…
- la possibilité de cultiver également ses propres céréales en étant paysan-boulanger ou paysanne-boulangère.
* La majorité des boulangers et boulangères aux Champs des Possibles se fournit en farine auprès de Florian Gamé paysan-meunier de la ferme du Chaillois, à Thénisy, et également sociétaire de la coopérative. Il y transforme ses céréales ainsi que celles cultivée sur la ferme de Toussacq.
Quelles qualités pour être heureux·se en boulange ?
- être bien organisé·e
- rester efficace sous la pression
- ne pas avoir peur de faire de longues journées
- en l’absence de boutique dédiée, disposer d’une bonne force commerciale
Quelles compétences indispensables ?
- savoir -et aimer !- faire du pain
- le sens de l’observation et de l’adaptation : c’est au boulanger ou à la boulangère de s’adapter à son pain, matière vivante qui pousse plus ou moins vite… et non l’inverse. Pour rester en mesure de fournir toujours la même qualité et quantité de pains, il est indispensable de savoir réagir rapidement aux aléas.
Au programme d’une semaine en boulange…
La plupart des boulangères et boulangers à la coopérative consacrent 3 ou 4 jours par semaine à la production/livraison de leur pain, le reste étant consacré aux tâches de préparation, courses, démarchage commercial ou administratif.
L’amplitude horaire des journées de production dépend des techniques utilisées. Par exemple, des fermentations longues imposent de démarrer la veille au soir, pour être cuite au matin. A l’inverse, la « pousse directe », dans laquelle on injecte plus de levain, permet de concilier pousse et cuisson dans la même journée.
A chacun et chacune de trouver le meilleur fonctionnement pour allier ses exigences de qualité de production et celles de ses débouchés commerciaux, mais aussi le temps à y consacrer, les contraintes liées aux livraisons, à sa vie personnelle et sa propre santé.. !
Quel four à pain choisir ?
Aux Champs des Possibles, on dénombre quasiment autant de fours différents que d’entrepreneur·ses qui les utilisent :
- A Toussacq, un four maçonné à gueulard avec une sole fixe de 9m2, qu’utilise Emily ;
- A Saulx-les-Chartreux, un four maçonné Ephrem, pratiqué par Eric ;
- A Combreux, c’est un four type soupart qu’utilise Bastien tout comme Ludovic, Rémi, Vivian ;
- A la Ferme des Millonnets, c’est un four romain auquel sont aux manettes Rémi et Sophie ;
- Enfin, c’est dans un fournil mobile de l’armée suisse qu’exercent Raphaël & Océane.
Ce sont tous des fours à bois, ce qui a l’avantage d’être une énergie renouvelable mais demande aussi de gérer les commandes de bois, de savoir le fendre en fonction de la taille de son foyer etc. Sachez aussi que toutes les essences de bois ne chauffent pas pareil… et oui, c’est tout un apprentissage de savoir faire fonctionner son four.
Quels autres investissements prévoir dans son fournil ?
Là encore, cela dépend des pratiques et systèmes de production.
Disons qu’a minima, un fournil comprend un four, un frigo pour y conserver son levain et parfois des produits laitiers (beurre, fromage, etc.), un point d’eau, des plans de travail, des bacs, un « parisien » (grosse étagere à roulettes sur lequel on pose des grilles pour entreposer le pain), des bannetons ou des couches en fonction de la façon de travailler.
En option, on peut ajouter des chambres de fermentation et de pousse, des pétrins mécaniques, des moules pour certains types de pains, un batteur, un refroidisseur d’eau…
Produire du pain… mais encore ?
Les produits transformés en boulange peuvent être très variés.
Déjà, le pain se décline en plusieurs gammes (en fonction des types de farines utilisées, de la forme du pain, de l’ajout de graines ou de fruits…).
En plus du pain, le fournil peut produire des biscuits, brioches, viennoiseries, biscuits secs, cakes, madeleines, pizzas, fougasses… Tout est bon pour régaler les papilles !
Quels débouchés en Ile-de-France ?
Une des spécificités du métier est que le pain est un produit qui doit être vendu rapidement une fois sorti du four et ne peut donc pas être stocké. Le boulanger ou la boulangère doit donc trouver des débouchés adaptés au fait de devoir fonctionner sans stock :
- Le réseau des AMAP : c’est le débouché principal des personnes en boulange aux Champs des Possibles. A noter cependant, un boulanger aura besoin de plus d’AMAP partenaires qu’un maraîcher, ce qui peut entraîner beaucoup de km et de déplacements à prévoir… d’où l’intérêt du collectif pour mutualiser certaines livraisons.
Un conseil pour commencer : accepter des contrats qui semblent loin au début aide à se lancer. On resserre ensuite petit à petit sur les zones plus proches de son fournil ou dont le nombre de contrats grossit.
- Les marchés en vente directe,
- Les magasins spécialisés bio,
- Les comités d’entreprise, notamment dans des entreprises où travaillaient des boulangers et boulangères avant leur reconversion
- Les plateformes de commande en ligne, avec livraison ou retrait dans la semaine.
Quelles formations ou diplômes pour exercer en boulange ?
Le CAP boulangerie forme à la boulangerie traditionnelle, qui contrairement à celle réalisé par les entrepreneur·es des Champs des Possibles, est essentiellement basée sur l’usage de levures et non de levains. C’est un diplôme obligatoire pour exercer le métier de boulanger.
Pour apprendre la boulangerie artisanale et paysanne, vous pouvez en complément :
- faire des expériences ou stages en immersion auprès de personnes qui exercent ce type de boulange ;
- regarder les vidéos de l’Ecole Internationale de Boulangerie
- lire Notre Pain est politique, Traité de boulangerie au levain de Thomas Teffri-Chambelland et Paysan-boulanger d’Adrien Pelletier
🎙️ Propos recueillis auprès d’Hugo Guggenbuhl, chargé d’accompagnement aux Champs des Possibles
Crédits photo de couverture : Alexandra Serrano
Le conseil d’Hugo pour devenir boulanger et boulangère ?
“Faire des stages et se former ! La boulange est une activité porteuse et rémunératrice. Les Champs des Possibles accompagnent un collectif solide d’entrepreneures exerçant ce métier, et des pistes d’installation existent dans plusieurs fermes partenaires… N’hésitez plus à vous lancer !”